Cette rencontre organisée par AGIR RELIANCE en lien avec le Musée Portuaire de Dunkerque s'est tenue dans le cadre privilégié du Phare du Risban et était une première dans la ville

Thème de la soirée :  La liberté

Retour sur le débat

Daniel Ramirez a introduit le débat en saluant le fait qu’il ait pour cadre ce lieu remarquable et pétri d’histoire.

 Plusieurs angles autour de thème de la liberté ont été abordés et débattus :

I –Le conditionnement 

  • Nous ne sommes pas libres, à cause de diverses obligations dans notre vie :

-          La famille dans laquelle nous naissons, les  études, le travail, puis le rôle de parents à assumer, etc…

Néanmoins, ces contraintes ne sont pas des prisons, sur les vraies prisons voir l’ouvrage « Surveiller et punir » de Michel Foucault, sur l’institution pénitentiaire.

  • Nous sommes libres quand nous pouvons nous exprimer sans crainte, alors que cela est « cadré » par : La morale, l’Eglise, les interdits, la «bien-pensance», le politiquement correct…  

Il semble que personne ne changerait une vie de contraintes et de combats, pour rester dans une « prison dorée » ou tous ses besoins et tous ses désirs seraient assurés de satisfaction immédiate et sans effort, sans contraintes.

 

Il faut convenir que les contraintes institutionnelles ou légales ne sont pas forcément négatives : exemple l’interdiction de l’inceste, l’interdit de tuer, etc…

Il existe même de nouveaux interdits qui sont un progrès : ne plus se moquer des handicapés, ne pas faire de réflexions racistes ou homophobes.

Chasser un mot du vocabulaire ne suffit pas à supprimer le problème, exemples : la discrimination et le rejet selon la couleur de peau, l’orientation sexuelle …mais c’est un autre débat …

-          Nous ne somme pas libres quand nous sommes soumis à nos désirs qui nous tyrannisent, et quand nous ne savons pas,  (ou ne pouvons pas) leurs imposer des limites : Recherche des plaisirs, exercice du pouvoir, esprit de  compétition, valeur accordée à l’avoir plutôt qu’à l’être…

  • Pour pouvoir se sentir libre il faudrait d’abord comprendre toutes ces influences, parvenir soit à les accepter, soit à s’en libérer, à les dépasser.

Mais comment ?

Pour se battre « pour la liberté », il faut savoir qu’elle existe, mais la liberté ne se trouve pas en suivant la pancarte « par ici la liberté » !

Sauf en ce qui concerne la liberté de circuler : quand les gens sont empêchés de traverser leur pays ou des frontières, l’on voit bien qu’ils risquent leur vie pour le faire !!!

A noter que certains Etats essaient même de supprimer la libre circulation des idées, par la suppression des journalistes ou le verrouillage d’Internet ! (cependant il faut exercer un doute critique envers les informations qui circulent sur internet et vérifier qu’elles ne soient pas des mensonges).

II - Suis-je libre d’ « être » libre ?

Le terme « libre-arbitre » signifie que nous pouvons exercer un « arbitrage » entre deux décisions, en sachant qu’il existe le bien et le mal.

 Il vient du moyen-âge, où il était considéré que les hommes peuvent avoir ce choix, tandis que les anges ne peuvent que faire le bien.

  • Le libre « arbitrage » est un ressenti, une conviction personnelle
  • C’est la décision d’agir ou de ne pas agir qui fait exister mon « arbitrage » en face de 2 options.
  • Si on choisit soi-même sa voie on ne se sent plus « enfermé »
  • Spinoza expose que c’est par l’ignorance des causes que l’on croit en son libre-arbitre ; si l’on accédait à la connaissance « vraie », et donc à un exposé clair de la situation, il ne serait plus nécessaire de faire un choix, l’action nécessaire serait évidente. La limite se trouve dans l’obligation d’agir sans avoir la possibilité de tout savoir…
  • Sartre : L’être de l’homme n’est pas une forme prédéfinie. Il ne possède pas une «essence », il advient par ses actions, son « existence ». « Jamais nous n’avons été plus libres que sous l’occupation allemande »…Voilà qui nous renvoie à la véritable question sur la liberté, celle de notre responsabilité, fondamentale, essentielle : quelle valeur voulons-nous vivre ? Car à cette époque il n’y avait que 2 choix possibles : collaborer avec l’occupant ou résister en risquant sa vie.

 III- Les libertés

Hannah Arendt explique la distinction entre la dictature qui contraint physiquement ou tue les opposants, et le pouvoir totalitaire qui organise une contrainte sur les esprits en utilisant la propagande et en muselant la presse, s’assurant ainsi le contrôle des consciences.

De nos jours il existe aussi, malheureusement, une combinaison plus ou moins grave de dictature associée au totalitarisme…

Il y a « des » libertés qui s’écrivent avec un complément :

-  d’accéder à l’éducation et donc à la connaissance, à la satisfaction des besoins matériels nécessaires à la vie, de se soigner, de se grouper pour être et agir de façon collective, de circuler, de donner son opinion soit en prenant la parole, soit en écrivant des livres, ou des articles dans la presse.

La liberté de création est un formidable moyen de dire et faire comprendre les contradictions entre l’aspiration à la liberté perçue par l’artiste et celle que la société lui accorde.

Ce sont toutes ces libertés qui permettent d’acquérir « la liberté de penser ».

 IV-   La liberté « en soi »  existe-t-elle ?

Kant et la notion de LIBERTE : Kant a innové et conçu une théorie, dans laquelle il distingue deux domaines :

Les « phénomènes » : les choses qui nous apparaissent dans la sphère spatio-temporelle, c’est le champ où s’exerce la science, où toute chose résulte d’une causalité que l’on peut découvrir…C’est aussi le domaine « DES libertés », que l’on peut conquérir, exercer ou défendre…

La « liberté en soi », la liberté existe, cachée par les « phénomènes sensibles » ; nous sommes libres d’une façon transcendantale, indémontrable.

Le postulat de la LIBERTE EN SOI est nécessaire, car il est le fondement de la morale.

La morale suppose l’existence du bien et du mal, c’est dans cet écart qu’il y a la liberté.

La démonstration du fondement moral de la liberté c’est que par ma volonté, je peux décider de faire le mal, de faire le bien, ou de ne rien faire (ce qui est encore un choix).

 Sur la liberté comme grande une idée et valeur, il faut se rappeler de :

- « Mahatma » Ghandi :

 L'histoire ne connaît pas d'autre exemple de libérateur d'un peuple qui ait su, comme lui, gagner la liberté d’un pays (l’Inde), par la désobéissance civile, qu'il appelait la «force de la vérité». Sans aucune violence.

- Nelson Mandela :

La cellule de Mandela faisait 3m2. Celui qui quelques années plus tard deviendra président d’Afrique du Sud n’a pas pu étendre les jambes durant son sommeil pendant 18 ans ! Il avait droit à deux visites et deux lettres par an. Pas de douche, pas de toilettes, les prisonniers se lavaient à l’eau de mer. Une eau froide...

Nelson Mandela a continué à garder sa liberté d’ « être le capitaine de son âme », privé de tout, mais utilisant sa conscience tant qu’il restait en vie.

Et dans cette contingence, il a fait reconnaître LA DIGNITE NECESSAIRE pour son peuple et au-delà.

 Les actions, en tant qu'elles produisent des actes, des paroles et des événements ont aussi une fonction directe : la mise en relation des acteurs dans l'exercice de leur liberté d'agir.

 Tout acte est une mise en situation : situation de communication, situation d'interaction.

 L'action est pour Hanna Arendt une mise en oeuvre de la liberté humaine. «Être libre et agir ne font qu'un» dit Arendt (La Crise de la culture, «Qu'est-ce que la liberté?», p. 198). La liberté est une forme de «virtuosité dans l'action»: la capacité de faire advenir l'improbable par son intervention dans le monde.

 C'est en ce sens que Hannah Arendt dit que l'homme libre est un «faiseur de miracle»: il fait se produire un «événement» au sens fort du terme, c'est-à-dire ce qui, sans lui, aurait eu très peu de chance d'arriver.

 C'est cela la fonction de l'action : l’exercice de la liberté.